Une lutte sans fin ?
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En 1984, la Ligue de l’enseignement lançait, avec un collectif d’associations, les semaines d’éducation contre les discriminations et le racisme. L’époque était marquée par le retour d’une extrême droite à même de remporter des élections locales, la multiplication de crimes racistes et d’émeutes urbaines mais aussi la "marche pour l’égalité" d’une génération décidée à faire reconnaître, dans la société française, la place de l’immigration et particulièrement celle des "beurs". Près de quarante ans plus tard, on peut se demander ce qui a fondamentalement changé.
Les plus optimistes feront valoir que, de cette mobilisation, est née une série de dispositions majeures : nouveau Code pénal de 1994 renforçant la répression des délits et crimes racistes, loi sur les discriminations de 2001 élargissant leur périmètre, qui recouvre aussi les discriminations de genre ou d’orientation sexuelle, et renversant la charge de la preuve, création de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde). Les plus pessimistes opposeront des faits : les partis fondés sur le rejet de l’autre sont désormais en position d’emporter des élections… nationales, la France est secouée tous les dix ans par des émeutes urbaines et les discriminations, par exemple envers les jeunes en raison de leurs origines, n’ont jamais cessé (voir le dossier de l’Injep).
Certainement, beaucoup liront avec attention l’ouvrage de Thomas Piketty Mesurer le racisme, vaincre les discriminations paru il y a quelques semaines qui constate l’ampleur d’une société largement métissée mais effectivement discriminante, défend le besoin d’objectiver cette réalité incontestable mais mal appréhendée et ouvre un débat pour adapter les politiques publiques concernées et, par exemple, changer la fiscalité sur les cultes et les associations (voir son interview en ligne). D’autres s’intéresseront aux travaux émergents sur le racisme et les discriminations existant… à l’école et à l’université. Et tous suivront la richesse et la diversité des initiatives prises par les mouvements d’éducation populaire et la Ligue de l’enseignement en particulier, avec de très nombreux collectifs et associations, aux quatre coins de la France, de la Haute Savoie à la Loire Atlantique et de la Sartheaux Bouches-du-Rhône, sans oublier le déploiement à nouveau européen de Jouons la carte de la fraternité.
Au final, ce n’est pas une lutte sans fin mais un combat constamment renouvelé pour une République qui n’est pas "une" mais "indivisible" et ainsi nécessairement et heureusement diverse comme le rappelle la charte pour la diversité.